En 2020, la France aura ses Pégase, les César du jeu vidéo

En 2020, la France aura ses Pégase, les César du jeu vidéo

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Par Thibault Prévost

Publié le

La cérémonie sera organisée par la nouvelle Académie des arts et techniques du jeu vidéo, qui revendique 500 membres.

“Le jeu vidéo est au XXIe siècle ce que le cinéma a été au XXe siècle” : le 5 juin, le gaming français s’est donné lui-même des lettres de noblesse. Aux Champs-Élysées, rapporte Le Monde, le Syndicat national des jeux vidéo (SNJV) a annoncé coup sur coup la création d’une Académie des arts et techniques du jeu vidéo et la naissance, dès 2020, d’une cérémonie annuelle de remise de prix, les Pégase. Les jeux vidéo rejoignent donc le théâtre (Molières), le cinéma (César) et la musique (Victoires) dans l’agenda des cérémonies artistiques françaises.

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Au total, 19 prix seront remis par le jury de l’Académie (pour autant de catégories) pour récompenser les meilleures créations vidéoludiques de l’année passée. Outre des prix du “meilleur jeu” (indépendant, mobile, étudiant), on trouvera des récompenses plus particulières, comme pour “l’excellence narrative”, le “game design” ou le “service d’exploitation”. Des trophées individuels salueront le meilleur influenceur et le meilleur e-sportif. Enfin, trois prix seront réservés aux jeux vidéo étrangers. Le scrutin sera réalisé électroniquement, et le premier tour sélectionnera 5 à 7 nommés par catégorie.

Selon Le Monde, la première cérémonie devrait avoir lieu “au premier trimestre 2020”. Elle sera diffusée en direct sur Twitch et YouTube – même si le SNJV espère aussi une retransmission télévisée. Lévan Sardjevéladzé, président du SNJV, imagine “une cérémonie endimanchée mais avec un chatouillement de jeu vidéo”. Il faudra trouver l’équilibre entre la solennité académicienne et les délires esthétiques de la culture vidéoludique, mais cette cérémonie est une excellente nouvelle pour l’industrie hexagonale.

Un savoir-faire à mettre en avant

Julien Villedieu, délégué général du SNJV interrogé par France Inter, espère que les Pégase combleront les lacunes du grand public à propos du jeu vidéo, qui est pourtant la première industrie culturelle au monde et permet à la France de briller à l’étranger. Selon lui, “beaucoup de joueurs n’ont pas connaissance du fait que ce sont parfois des entreprises françaises qui créent ces jeux, et qui ont un rayonnement international.” C’est au collège de la future académie qu’incombera donc ce rôle de promouvoir la création française et son savoir-faire.

Ces académiciens et académiciennes seront sélectionnés, sur la base du volontariat, parmi les professionnels du milieu, et seront divisés en cinq corps de métier : image et son, management, édition et support, technologie et design. Un sixième cénacle rassemblera des représentants du journalisme spécialisé, des écoles et de la création vidéo. À peine lancée, l’académie revendique 500 membres et vise le millier “d’ici la fin de l’année”. Pour postuler, il suffit de remplir un formulaire.

Le jeu vidéo à la table des arts majeurs

L’initiative, rappelle Le Monde, poursuit une double ambition. À court terme, elle vise à donner plus de visibilité aux créations françaises dans l’univers mondialisé du jeu vidéo et rappeler au reste du monde que la France possède un solide écosystème de création. À long terme, dans le pays des beaux-arts, l’idée est de faire entrer le jeu vidéo à la table des arts majeurs et lui offrir l’anoblissement institutionnel qu’il mérite.

Cette quête de légitimité explique le choix d’un symbole comme Pégase pour le design du trophée : “On ne voulait pas quelque chose de connoté, qui puisse vieillir six mois plus tard, comme les manettes d’or ou un logo pixelisé. On voulait représenter l’élan du jeu vidéo, indépendamment de la dimension technologique. On cherchait quelque chose de classique et d’intemporel”, justifie Lévan Sardjevéladzé à France Inter.

Certains pourront bien regretter une forme de concession à l’étiquette institutionnelle. En effet, la stratégie est maligne : si le jeu vidéo veut prétendre aux ors de la noblesse culturelle et cesser d’être perçu comme un art adolescent, le meilleur moyen est encore de se draper lui-même dedans. Quitte à s’imposer, une soirée par an, un peu plus de rigidité. Jusqu’à présent, conclut Le Monde, les autres tentatives de récompenses annuelles françaises, les Paris Games Week Awards et les Ping Awards, organisés en octobre, n’y sont pas parvenus.