On a testé le nouveau Zelda : la recette de la nostalgie marche-t-elle encore ?

On a testé le nouveau Zelda : la recette de la nostalgie marche-t-elle encore ?

Image :

© Nintendo

photo de profil

Par Pierre Bazin

Publié le

Même si la Switch arrive à sublimer ce mythique épisode, on s'interroge encore sur l'intérêt (outre financier) pour Nintendo.

Depuis maintenant plusieurs années, les remakes sont en vogue dans l’industrie vidéoludique. Cette année nous avons ainsi eu droit aux versions modernisées de Resident Evil 2 et Crash Team Racing, et nombreux sont les fans à attendre le remake de Final Fantasy VII en mars 2020. Il faut dire que la recette est simple : prenez un grand classique qui a marqué toute une génération, actualisez les graphismes et vous obtiendrez un titre parfait pour titiller la fibre nostalgique des joueurs des années 1990 et intéresser les plus jeunes.

À voir aussi sur Konbini

Du côté de Nintendo, la recette a été bien comprise depuis longtemps et la série des Legend of Zelda est l’une des plus réactualisées de la firme nippone. Comme l’ont montré les versions 3DS d’Ocarina of Time (2011) et Majora’s Mask (2015) ou encore les versions Wii U de The Wind Waker HD (2013) et Twilight Princess HD (2016), raviver les couleurs de ce bon vieux Link ne coûte pas cher mais peut rapporter gros. Ainsi, lorsque Nintendo a annoncé il y a un an l’arrivée d’un remake complet du mythique épisode Link’s Awakening (1993) sur la Switch, les fans étaient aux anges.

Pour rappel, une version “DX” était déjà sortie en 1998 – il s’agissait d’une colorisation pour la Game Boy Color. Toutefois, ce que propose la Switch semble être plus qu’un simple rafraîchissement graphique : l’écart technologique entre la version d’origine et ce que peut proposer la Nintendo Switch est gigantesque.

Une ambiance fidèle

Si l’épisode Link’s Awakening a autant marqué toute une génération de joueurs et joueuses, c’est parce qu’il a une ambiance et un parti pris très particuliers pour la franchise. Exit la princesse Zelda, le maléfique Ganon ou encore l’emblématique Triforce : dans cet opus, vous vous réveillez dans la peau de Link, le célèbre héros hylien, après que votre bateau s’est échoué sur une plage de l’étrange île Cocolint, à la suite d’une tempête.

Le fait de se distancier des terres de Hyrule (le monde qui accueille les trois-quarts des aventures de Link) a toujours été la force de cet épisode et cette version Switch compte bien sublimer cette ambiance toute particulière. Vous retrouverez ainsi tous les personnages atypiques qui peuplent l’île Cocolint, des gentils habitants aux ennemis amusants en passant par la dizaine de références à d’autres jeux Nintendo (les Mario Bros. notamment) qui ont envahi ce décor onirique.

Les références sont plutôt assez claires, surtout dans ces superbes passages en <em>side-scrolling</em>. (© Nintendo)

Le scénario de Link’s Awakening est probablement l’un des plus étranges qui soit dans la franchise (avec celui de Majora’s Mask). En effet, sous ses airs enchanteurs, l’île Cocolint cache de nombreux secrets que seul le réveil du Poisson-Rêve (votre objectif final) semble pouvoir révéler. Nous ne divulgâcherons pas la résolution de ce mystère, mais sachez que vous pourrez compter sur l’aide de tous les personnages secondaires.

Les boss sont toujours aussi plaisants à battre, certains proposant une bonne dose de défi. (© Nintendo)

Le passé restauré (et quelque peu agrémenté)

Graphiquement, le travail est plutôt impeccable : les animations sont fluides et les textures resplendissantes, et la direction artistique du titre d’origine a été plus que respectée. Le côté “cartoonesque” de ce Link’s Awakening colle à la fois au jeu de 1993, tout en rappelant un peu l’époque des Phantom Hourglass et Spirit Tracks sur DS. Notons que plusieurs tests et témoignages rapportent de lourdes chutes de framerate, particulièrement sur les transitions sur la carte principale (pour ma part, je n’en ai relevé aucun).

La carte est la même que dans le jeu original, jusque dans ces moindres détails – ce qui est très appréciable pour tout vieux fan qui se respecte. Il faut admettre que l’expérience de jeu reste tout de même plus agréable en mode nomade, ce qui nous rapproche de l’expérience sur Game Boy.

La mythique bande-son de Koji Kondo a elle aussi eu le droit à son remake – et les thèmes sont tout simplement magnifiés. Il faut dire que Link’s Awakening est particulièrement centré sur la musique puisque Link a pour objectif de rassembler les huit instruments légendaires de l’île pour chanter la chanson du Poisson-Rêve afin de réveiller ce dernier. Avec cette qualité sonore en HD, nous pouvons désormais profiter de toutes ces mélodies féeriques, à commencer par la sublime “Chanson de Marine”.

Clairement un épisode très axé sur la musique – et c’est plaisant. (© Nintendo)

Le principal ajout de cette version Switch est la Cabane d’Igor. En effet, ce bossu malicieux nous propose de créer nos propres donjons. Il vous suffit pour cela d’avoir fini l’un des huit donjons de l’île pour avoir accès aux “pièces” de ce dernier.

On ressent ici la volonté de Nintendo, comme pour Mario Maker, de permettre aux joueurs de créer leurs propres niveaux, partageables en ligne, tout en restant maître de ses outils de créations (Big N n’aime pas trop le “fan-made”). En réalité, si l’idée de créer son propre donjon Zelda est séduisante sur le papier, elle n’est que très peu excitante dans les faits. L’outil ne laisse aucune place à la vraie créativité et permet tout au plus des “mix de donjons” mais pas de réelles énigmes issues de l’esprit des joueurs (dommage).

Strict minimum ou réussite sans prise de risques ?

Le principal défaut de ce Link’s Awakening est, au choix, une frigidité vis-à-vis de l’innovation ou une peur de trahir les fans hardcore. Si l’idée de retrouver l’île Cocolint en HD est certes très plaisante, les vraies nouveautés sont rares.

Aucun nouveau donjon, pas une seule “quête ultime” pour tester nos capacités ou encore un quelconque “New Game +“. Si vous connaissez le jeu de base, vous balayerez d’un revers d’épée ce titre : vous irez jusqu’à la fin mais n’y retoucherez probablement plus. Il y a bien quelques fragments de cœur de plus ici et là, mais c’est tout. Les boss sont identiques et les énigmes – bien que toujours aussi bien ficelées et équilibrées – restent malheureusement les mêmes (à quelques détails près).

La pêche c’est marrant 5 minutes, pas plus. (© Nintendo)

Plus frustrant encore : l’ergonomie n’a pas vraiment été améliorée, à part pour le déplacement en diagonale permis par le joystick. On aurait aussi apprécié qu’il y ait un peu plus que deux boutons de raccourci pour les objets. Certes l’expérience d’origine est respectée, mais les allers-retours incessants entre le jeu et le menu de l’inventaire sont fatigants à la longue. Pourquoi ne pas avoir utilisé toutes ces touches non attribuées, comme le D-pad ou les deux gâchettes qui ont le même effet à gauche ou à droite ?

Enfin, les petits mini-jeux qui nous sont proposés ne sont plus très amusants en 2019. Leur petit nombre nous laisse sur notre faim et quelques ajouts de ce côté-là n’auraient pas été une trahison.

Résultats : C

Au final, Link’s Awakening n’est “que” un remake. Le jeu originel étant génial, cette refonte reste un très bon jeu en soi, mais on regrette finalement que cette courte histoire n’ait pas le droit à une vraie plus-value, 26 ans plus tard. Les fans seront comblés de le finir et les nouveaux joueurs qui découvrent l’épisode seront surpris comme nous l’étions la première fois, mais une fois la quête principale terminée, vous laisserez probablement le jeu traîner sur une étagère sans jamais y retoucher.

Ce qui est cool :

  • Retrouver toute l’ambiance originelle magnifiée par les graphismes cartoons et la bande-son HD.
  • Le gameplay d’origine, toujours aussi efficace.
  • Le magnifique scénario de base, mis en valeur par l’ambiance remasterisée.

Ce qui est moins cool :

  • Aucune réelle nouveauté, autre que visuelle, qui donnerait une plus-value à cette version.
  • Le système anecdotique de création de donjons, alors que le potentiel était grandiose.
  • Trop court pour un jeu vendu au prix fort.