On a rencontré le plus grand serial noteur du site SensCritique

On a rencontré le plus grand serial noteur du site SensCritique

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© Julien Andrieux/Pixabay, Sens Critique

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Par Julie Morvan

Publié le

Enseignant le jour, il devient critique de cinéma la nuit.

Vous connaissez peut-être SensCritique, cette plateforme où, comme son nom l’indique, on peut critiquer une infinité d’œuvres en tout genre : littérature, musique, jeux vidéo… et cinéma bien sûr. Les contributeurs y sont très nombreux : 1,3 million d’inscrits selon Maxime Ducrocq, PDG du réseau social.

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Certains rédigent des centaines de critiques et sont très influents sur la communauté : on les appelle les “éclaireurs”. Parmi eux, Éric Schwald, aka Sergent Pepper. Avec ses quasi 10 000 abonnés, il a noté plus de 7 400 œuvres et en a critiqué plus de 2 500. Actif sur la plateforme depuis 2013, il nous a raconté comment il est devenu le serial noteur de SensCritique.

Le cinéma, une passion de toujours

L’arsenal de ce sergent cinéphile est en effet assez impressionnant. Car s’il a donné son avis sur plusieurs milliers de productions culturelles, c’est du côté du cinéma qu’il est le plus prolifique. Des grands classiques aux obscurs films gothiques des années 1920, rien n’échappe à sa plume. Pour l’instant, il en a commenté plus de 2 100.

“J’écris toutes mes critiques sur un seul document Word depuis le début. Aujourd’hui, il doit faire 1 800 pages”, nous confie-t-il. “Je me lève très tôt, je mets environ une demi-heure à écrire puis je publie tous les matins vers 6 heures. Là, par exemple, j’en ai écrit 120 en avance”, complète-t-il.

Tout a commencé dans la cuisine familiale. Au petit déjeuner dominical, il avait l’habitude d’écouter ses parents débriefer du film qu’ils étaient allés voir la veille au soir. Un rituel qui l’a marqué et lui a transmis le virus du cinéma. Mais ce n’est que bien plus tard qu’il décide de se mettre à l’écriture.

Au début, c’était des petites notes publiées sur des forums de musique. “J’écrivais aussi sur les films que j’avais vus, les points saillants de l’histoire, se souvient-il. Comme le film que je venais de voir éclipsait le souvenir que j’avais du précédent, l’écriture a fait office de pense-bête.”

Son frère lui a ensuite parlé de SensCritique. Séduit par le principe et l’effort de rédaction fourni par les contributeurs de la plateforme, il s’y est inscrit en 2013. Selon notre “éclaireur”, SensCritique est aujourd’hui un bon complément d’Allociné et des critiques ciné traditionnelles. Car si, plus jeune, le passionné de cinéma dévorait les critiques du septième art comme Le Masque et la Plume ou Les Cahiers du cinéma, il leur préfère aujourd’hui la critique amateure, plus libre.

La critique, mais avec style

Car Éric ne se contente pas de donner son avis sur les films, l’écriture d’une critique est aussi l’occasion de s’essayer à un exercice stylistique. C’est ce qui lui plaît sur SensCritique : loin des règles imposées dans les critiques traditionnelles, la plateforme prône au contraire une liberté d’expression sans contrainte de forme ni de contenu.

Ainsi, pour donner son avis sur le grand classique des frères Coen, The Big Lebowski, il s’est exprimé… en alexandrins ! Et franchement, décrire le Dude à coups de “L’œil au risque aguerri, les jambes écartées / De diverses boissons la barbe maculée”, il fallait le faire. Une chanson de geste 2.0.

Ce genre d’acrobatie littéraire a d’ailleurs plu à sa communauté, puisqu’elle a été lue plus de 1 700 fois. Mais d’autres défraient carrément la chronique critique, comme ses “Arcanes du blockbuster”, imaginant les discussions absurdes qui ont abouti à des films comme Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ? ou Lucy.

La première, dénonçant la longue série de clichés développés tout au long du film, a dépassé les 14 000 lectures. La seconde, résumant le synopsis de Luc Besson à “Stars. Intelligence. Poursuites. Gunfights. Fin de ouf” presque 17 000.

Du pastiche d’anciens genres littéraires à la mise en situation presque théâtrale de l’industrie cinématographique, SensCritique offre donc aux contributeurs actifs comme Éric une liberté d’expression inédite par rapport aux médias traditionnels spécialisés. La plateforme permet aussi aux contributeurs de partager leurs goûts via des formats plus normés, comme la “liste”.

Ces “listes” publiques servent à classer les œuvres sur n’importe quel thème, selon n’importe quel critère. Il en existe 2,5 millions sur SensCritique, rapporte Maxime Ducrocq. Elles permettent d’explorer une infinité de livres, films ou morceaux de musique, classés selon les sensibilités propres à chacun.

Parmi celles d’Éric Schwald, on retrouve par exemple “Les Arcanes du blockbuster”, ces films qu’on n’assume pas trop d’être allés voir, des “cycles” des meilleurs films par réalisateurs, les films à regarder quand il neige, des déceptions cinématographiques et des recommandations comme cette liste : “Ces films que je soumets à mes élèves”.

Critique la nuit, professeur le jour

Car si la nuit (ou, du moins, très tôt le matin), Sergent Pepper rédige des critiques, le jour, Éric Schwald est professeur en lycée. Une situation qu’il nous résume en une phrase : “J’ai trois temps pleins : ma famille, ma classe et le cinéma.” Dans sa salle de classe, de laquelle il nous appelle, on distingue même une série d’affiches de cinéma placardées sur le mur du fond.

En cours, on ne parle pas de son activité de serial noteur : il s’est même rendu compte que si certains élèves le suivaient sur le réseau, ils se gardaient bien de lui dire. Ce n’est qu’une fois le lycée fini qu’ils entrent en contact avec lui par messagerie privée.

Un des éclaireurs avec lequel ils se suivaient mutuellement depuis plusieurs années s’est même avéré être un ancien étudiant à lui. Ce dernier l’a constaté en tombant sur la fameuse liste “Ces films que je soumets à mes élèves”, réalisant que les films en question réveillaient des souvenirs de cours.

Comme bon nombre de contributeurs sur la plateforme, Éric Schwald ne prétend pas être un expert de la critique cinématographique. Ce qui l’intéresse dans cet exercice, dans ce dialogue avec ses élèves, ses abonnés ou d’autres éclaireurs, c’est de pouvoir aussi redevenir un élève qui apprend, écoute… et regarde.

Si vous aussi vous êtes un cinéphile qui aime donner son avis sur SensCritique, vous pouvez nous écrire à : hellokonbinitechno@konbini.com.