En images : on a assisté à un match d’e-sport en réalité virtuelle

En images : on a assisté à un match d’e-sport en réalité virtuelle

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Par Benjamin Bruel

Publié le

On voulait savoir si la sueur et les squats se marient bien avec un casque Oculus.

Aaaah, la réalité virtuelle, cette chose étrange remplie d’espoirs et de scepticisme.

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Au début de la décennie, on se disait tous qu’on allait bientôt pouvoir se catapulter d’un monde virtuel à un autre en une minute. Qu’avec notre casque vissé sur la tête, ça allait être vraiment chouette de partir dégommer des démons dans un univers à la Doom ou d’aller se promener en amoureux dans une cité virtuelle futuriste.

Mais non. À l’aube de l’année 2020, notre foi dans la réalité virtuelle a été salement amochée par un bon paquet de jeux sans ambition aux graphismes souvent dégueulasses, et par des casques à 500 balles dans lesquels on n’a pas vraiment envie d’investir. Ready Player One, se dit-on, ce n’est pas pour demain.

Dans ce contexte plein de déceptions, à quoi peut bien ressembler l’e-sport en réalité virtuelle ? Difficile à croire, mais certains irréductibles comme le studio français smartVR, créateurs du projet EVA, misent gros dessus, persuadés que le combo réalité-jeux vidéo sera le futur de l’e-sport, voire du sport tout court. On est allés les rencontrer à l’occasion de Virtuality, le salon dédié à la réalité virtuelle et la réalité augmentée, qui s’est tenu à Paris le week-end du 23 novembre.

Casque à casque virtuel et flingue en 3D à Paris

Nous y sommes. Une petite salle façon amphithéâtre, un peu cachée au fond du grand hall de l’espace Centquatre, à Paris. C’est samedi, il ne fait pas trop moche et, honnêtement, il y a peu de monde pour venir assister à ce showmatch de la Team TDS, une équipe e-sport semi-professionnelle sur After-H.

After quoi ? After-H, mécréant, le FPS en réalité virtuelle développé par smartVR, un jeune studio montreuillois pétri d’ambitions. Le principe du jeu est, somme toute, similaire à celui d’un Call of Duty et consorts : plusieurs joueurs s’affrontent en équipe sur différentes cartes et différents modes de jeu.

Aujourd’hui, c’est mode domination en deux contre deux, Alliance contre Rebelles. Les quatre joueurs sont installés sur scène, on les voit se déhancher de manière un peu étrange, façon tecktonik en 2008. Pas vraiment esthétique, mais c’est assez drôle de les observer se mouvoir ainsi en lâchant des “Il est low ! Il est low !” à leur coéquipier pour signifier que l’adversaire n’a presque plus de vie.

“C’est l’immersion, la gestion, le placement, toute la kinesthésie dans le jeu qui nous fait kiffer sur un FPS en réalité virtuelle”, explique Carol, aka Ticrol, à la fin du match. “Faut être prêt à bondir, à faire des squats tout en visant et en tirant et ça nous éclate”, renchérit Alexandre, aka Shin.

Les quatre compères de l’équipe se sont rencontrés en squattant à Mindout, une salle d’arcade dédiée à la réalité virtuelle où ils venaient taper des sessions de VR, faute d’avoir la place ou les moyens de s’équiper à la maison.

Ce n’est pas la même limonade ici. Lors de ce showmatch, tous les joueurs sont équipés d’un casque Oculus et d’un backpack MSI, qui permet de transporter son casque comme s’il était branché à un ordinateur fixe. Shin a même un fusil imprimé en 3D entre les mains, aux contrôleurs classiques.

Mais c’est surtout au-dessus de la scène, sur le grand écran où se déroule le jeu, que les choses prennent une certaine allure. C’est plutôt chouette à regarder, ce FPS en arène coloré. On voit assez bien les stratégies des joueurs essayant tantôt de prendre l’adversaire par le flanc, tantôt de se cacher (virtuellement) derrière un muret et de lever (réellement) la main pour viser l’adversaire à l’aveugle.

Et la visée, en réalité virtuelle, ce n’est pas horrible ? “C’est propre et c’est assez précis. Après, comme tous jeux, tu habitues ton corps à ton matériel et aux postures qu’impose le jeu, à sa mémoire musculaire”, nous affirmera Carole après la partie devant notre moue un brin dubitative.

Dans les entrailles de la future arène virtuelle de Paris

Il faut dire qu’à Virtuality, qui s’est tenu pour la troisième année consécutive, on ne trouve que des enthousiastes de la réalité virtuelle. Le moral de Jean Mariotte, patron et fondateur de smartVR, n’est même pas un peu entamé par le peu d’affluence pour ce showmatch. Trois semaines plus tôt, à l’occasion de la Paris Games Week, lui et son équipe ont pris un énorme shot de confiance en l’avenir lors de la présentation de leur nouveau projet au grand public.

Dès le printemps prochain, Paris accueillera en effet EVA, pour Esport Virtual Arena. Le premier espace au monde entièrement consacré à l’e-sport en réalité virtuelle, conçu par smartVR après la conclusion d’une levée de fonds à 2 millions d’euros en juin dernier.

Lors de la PGW, l’entreprise a donné un aperçu de cette future arène de 1 000 m2 en construisant un vrai petit stade (200 m2). Résultat ? Une belle foule, une compétition (remportée par la Team DBS) au cashprize de 3 000 euros et beaucoup d’espoirs placés dans le futur d’EVA chez les joueurs.

À EVA, monsieur Tout-le-monde pourra venir tâter de la réalité virtuelle en arcade. Mais le grand projet de Jean Mariotte, c’est d’en faire un espace véritablement e-sport où on vient regarder des matchs du championnat After-H qu’il ambitionne de créer.

On va essayer de coordonner une ligue nationale, voire internationale, pour impulser la chose, mais, à terme, notre philosophie c’est de donner les ressources et faire le maximum pour que les gens s’approprient le jeu et organisent leurs propres tournois“, explique-t-il.

Dans la future arène, les matches d’After-H se dérouleront en free roaming, c’est-à-dire avec la possibilité de se déplacer librement (et véritablement) dans la zone de jeu. Une capacité qui change la donne de l’e-sport en réalité virtuelle. “Se mouvoir dans l’espace, c’est vraiment un plus. Tous les mouvements qu’on fait ont un impact dans le jeu, qu’il s’agisse de se baisser ou de bouger ses bras. Le free roaming, ça rend l’intelligence du joueur encore plus importante qu’au combo clavier/souris”, nous explique Shin, enthousiaste.

Faire des squats pour marquer des points

Finalement, ne sommes-nous pas trop pressés quand on parle de réalité virtuelle ? Cette année, selon une étude dévoilée à l’occasion du salon Virtuality, 330 000 casques VR/AR se sont vendus en France. C’est peu, en comparaison des ventes de consoles, mais c’est cinq fois plus que l’année précédente.

“Tant qu’on ne sera pas dans une utilisation grand public et mainstream des casques de réalité virtuelle, on ne pourra pas remplir un Bercy sur une finale de After-H, évidemment. On essaie de créer un engouement, un nouveau show autour de quelque chose que le public découvre. Mais à moment donné, en développant la ligue, les compétitions et l’enjeu, on sera limité si la réalité virtuelle ne suit pas à la maison”, reconnaît Jean Mariotte.

Les joueurs comme l’entrepreneur sont persuadés que la “promesse VR” va finir par se réaliser et que l’on s’équipera tous de casques. “La question pour nous, ce n’est pas si ça va arriver à la maison. C’est ‘quand ?'”, conclut Jean Mariotte.

En attendant que les casques soient moins chers et de meilleure qualité, beaucoup d’autres entreprises avancent leur pion pour une réalité virtuelle compétitive, comme la VR League américaine sur Echo Arena et Echo Combat, les Polonais à l’origine de Hyper Arena ou même récemment Ubisoft avec Space Junkies.

En attendant que Twitch ou Mixer mettent en place un mode VR pour mieux visionner les compétitions avec son casque ?